Une histoire de képi
Au fil de nos recherches, nous avons pu retrouver un képi de sous lieutenant du 151éme RI, du modèle identique à celui que portait les soldats de 1940. Celui ci était accompagné d’une fourragère surmonté d’un insigne du régiment
Sur la partie inferieure de la visière se trouve deux lettres dorées : P L
A l’intérieur du bandeau on y découvre une petite étiquette blanche avec un nom et une date : Mr LAFFORGUE Sous Lieutenant , 25 aout 1938
Mais qui est donc ce jeune sous lieutenant ?
Pierre- Jean LAFFORGUE est né le 8 mai 1915 à Bergerac. Fils du Général Jules LAFFORGUE, il s’oriente naturellement vers une carrière militaire. Jeune homme d’un mètre quatre-vingt aux cheveux bruns et yeux marron, il s'engage à l’école spéciale militaire de Saint Cyr. Après avoir réussi le concours d’entrée, il intègre le 1er octobre 1936 la promotion du soldat inconnu au sein de la 8éme compagnie et cette formation va durer 2 ans
En 1938 il réussit son examen de sortie et se classe 131ème sur 360. Il obtient le grade de sous lieutenant et reçoit son affectation qui l’amène au 151éme régiment d’infanterie stationnée à Metz le 15 septembre. Il participera également au cours d’instruction sur le matériel optique et topographique au mois de mars 1939
Le 2 septembre 1939 lors de l’entrée en guerre il est chef de section à la 10éme compagnie commandé par le Capitaine Claudel
Le 28 novembre 1939, il est affecté à la compagnie d’accompagnement du 3éme bataillon
La veille, il commande une patrouille de liaison de 16h50 à 18h30 qu’il mène de la sortie Nord de Colmen , position de la 10éme compagnie , jusqu’au coude de la route de Flastroff où il prend contact avec ses camarades de la 9éme compagnie
Après le repos dans le secteur de Pont à Mousson, le mois d’avril 1940 verra une forte activité
Faisant parti du corps Franc du 3éme bataillon , il va participer à plusieurs opérations
Le 12 avril 1940 il tend une embuscade de nuit avec ses hommes dans l’Eichenwald mais sans résultat. Deux jours plus tard le 14, toujours de nuit, il les conduit à nouveau pour une reconnaissance du château de Merten. Prenant un maximum de précaution, il le trouve cependant vide. Enfin dans la nuit du 27 au 28 avril, installé avec ses hommes entre les points d’appui, il reçoit à coup de grenade une patrouille allemande qui tente de s’infiltrer sur la rive gauche de la Nied à hauteur de Niewelling.
Il sera cité à l’ordre de la brigade le 1er mai 1940 avec l’obtention de la croix de guerre avec étoile de bronze
Plus tard, en juin lors des combats sur l’Aisne , il se trouve à Auménancourt le Petit ou il est très probablement blessé le 10 juin 1940 comme l’atteste ses états de service (campagne contre l’Allemagne du 2 septembre 1939 au 10 juin 1940)
Blessé, il est évacué sur le groupe de santé divisionnaire puis est dirigé à l’hôpital de Toulouse le 19 juin.
Il en sort le 14 aout 1940 et part en congé de convalescence. Par la suite il est affecté au 24 BCP et romu Lieutenant
Muté au 7éme Régiment de Tirailleurs Marocains il débarque à Oran le 24 janvier 1941 et s’embarque pour Oran pour rejoindre le Maroc. Il arrive dans son nouveau régiment le 29 janvier et sera affecté à la 1ere compagnie de ce régiment.
Il bénéficiera d’une permission de trente huit jours qu’il ira passer à Nice. Retourné dans son régiment en mars 1942, il sera affecté à l’état major en janvier 1943. Il est ensuite porté disparu en Tunisie à OUM EL HABOUAB le 19 janvier 1943
Arrêté par les allemands il arrive à s’échapper lors de son transfert en Italie. Rejoignant Nice, Pierre Lafforgue signe un engagement dans un réseau FFI et passe dans la clandestinité en 1944 et se fait appelé PHILLIPE .Célibataire, il demeure légalement au 41 boulevard Gambetta à Nice.
Il est arrêté une première fois le 22 avril 1944 lors d’un rendez vous dans un café à Marseille place de la Castellane avec trois autres résistants. Conduit tous les trois au siège de la gestapo, ils sont sévèrement interrogés.

Interné à la prison des Baumettes, on le met dans un train avec d’autres résistants en direction de l’Allemagne. Leurs destinations est le camp de Neuengamme. Parti de Marseille, il est mis dans un convoi d’environ 2000 internés qu’il rejoint à Compiègne. Mais dans la nuit du 4 au 5 juin 1944 sur la ligne Paris-Strasbourg entre Chalons sur Marne (devenu Chalons en Champagne) et Vitry le François, 45 hommes arrivent à s’échapper d’un wagon .Philipe Jean LAFFORGUE est l’un d’eux
Avec deux autres résistants évadés (Yves NOEL et Marcel MARCHAL) ils regagnent tous les trois Lyon en train via Paris .Regagnant le sud est , il se dissimule sous le nom de Lafargue
Mais le 19 juin, il est de nouveau arrêté à Aix en Provence dans la rue avec de faux papiers à son nom d’emprunt. A nouveau interrogé par la gestapo il est accusé une nouvelle fois d’espionnage. Il sera de nouveau transféré à la prison des Baumettes. Il partagera sa cellule avec François Pelletier arrêté quand à lui le 23 juillet. Après un jugement sommaire, Pierre Jean LAFFORGUE, avec 8 autres résistants (dont François Pelletier) sont fusillé le 12 aout 1944 dans le vallon des signes dans le département du Var
Le 17 septembre 1944, les corps seront découverts et identifiées. Un monument funéraire sera inauguré sur les lieux même le 18 juillet 1946 et deviendra nécropole nationale en 1996.Pierre Jean LAFFORGUE y repose encore. Il lui sera attribué à titre posthume la légion d’honneur et la croix de guerre avec palme le 27 aout 1945